Maryse Ngalula : «On peut gagner sa vie grâce à son talent, sans faire un mauvais usage de sa féminité»

Article : Maryse Ngalula : «On peut gagner sa vie grâce à son talent, sans faire un mauvais usage de sa féminité»
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13 août 2014

Maryse Ngalula : «On peut gagner sa vie grâce à son talent, sans faire un mauvais usage de sa féminité»

« Les scènes musicales congolaises se vident des talents féminins. ». L’œuvre artistique de la femme congolaise n’est pas souvent considérée comme elle le devrait, ni jugée à sa juste valeur car la femme artiste est souvent utilisée comme un objet et non comme un sujet à part entière alors qu’elle a le talent et toutes les compétences pour être leader d’un groupe ou d’un orchestre à l’instar de ses collègues masculins. Elle est reléguée au second plan (danseuses, accompagnatrices, etc.) Les us et coutumes de la société congolaise ne sont pas de nature à favoriser son expression individuelle ou artistique. C’est la raison pour laquelle Maryse Ngalula s’engage dans un combat, non pas  » féministe «   mais plutôt de «  méritocratie «  afin d’arracher cette femme artiste de stéréotypes qui l’assujettit en plein XXIe siècle.

Maryse sur la scène (Ph. Akacia)
Maryse sur la scène (Ph. Akacia)

En mal de positionnement, l’artiste congolaise se bat pour pouvoir donner libre cours à son talent et prendre son destin en main. L’artiste musicienne congolaise, Maryse Ngalula est donc dans ce lot. Pendant longtemps et à cause des us et coutumes, cette dernière a dû faire taire son âme d’artiste et réprimer son talent. L’ agence Akaçia, une société de production et de diffusion militant pour la promotion de l’artiste congolaise à travers le projet « Basi Na Mizik » s’engage à l’autonomisation et la professionnalisation de la femme artiste congolaise, qui, selon sa coordonnatrice Maryse, ne peuvent se matérialiser que par le biais de l’éducation et l’encadrement professionnel.

D’après elle, tout travail de qualité passe avant tout par des formations multiples ainsi que par voie d’un « mentor ». C’est dans cette optique qu’elle affirme que l’œuvre de la femme ne peut émerger sans une reconnaissance préalable de la valeur des œuvres d’autres femmes qui ont réussi dans le domaine, avant de soutenir que la collaboration entre les femmes doit constituer le fruit d’un réel apprentissage pour démontrer leur savoir-faire et démystifier certains adages africains présumant qu’« une femme ne peut construire une nation » ( en lingala : Mwasi atongaka mboka te).

Pour se faire, elle initie des sessions de formation pour les femmes artistes dans ledit projet  » Basi Na Mizik « , qui, souligne-t-elle, vise le renforcement des capacités des artistes congolaises en leur permettant de parvenir à l’épanouissement et au professionnalisme, sans lesquels elles resteront  toujours « insubordonnées ». De ce partage d’expériences, dit-elle, ces artistes stimulent l’émulation en ressortant ragaillardies et prêtes à vivre indépendamment de leur art.

« Basi Na Mizik » est composé en grande partie d’autodidactes et de musiciennes formées à l’Institut national des arts congolais (INA), fait-elle savoir en précisant qu’il reste le premier orchestre féminin à être dirigé par une femme, au Congo et en Afrique, et inculque une nouvelle mentalité aux femmes en les faisant sortir de la peur et des frustrations personnelles.

Ledit projet, note-t-on, est conforme aux articles 14-15 de la Constitution congolaise qui assure l’égalité et l’équité entre l’homme et la femme et l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard de celle-ci. Il s’inscrit également en droit fil du Protocole de la SADC sur le genre et le développement qui réclame l’égalité du genre et la participation paritaire de la femme, soit une répartition 50-50 à tous les niveaux.

Musicienne pédagogue de par sa formation sur la non-violence à l’université de Highland, Maryse se dit sensible et consternée par la violence subie par les femmes et les jeunes filles. Ce qui explique son engagement pour la cause de la femme, avant de commencer à donner des cours de résolution de conflits dans de nombreuses écoles de townships de Soweto (Afrique du Sud).

C’est vers les années 90 dans son Kananga natal ( Kasaï-Occidental) que Maryse entame timidement sa carrière musicale avec sa guitare en bandoulière en écrivant et composant ses propres chansons. En 1998, elle entre pleinement dans le monde artistique congolais, avant de s’installer en Afrique du Sud en 2002 et 2009. Elle est nommée en 2013 par l’Unesco ambassadrice de la jeunesse, de l’éducation à la nouvelle citoyenneté et aussi primée par la YMCA du Congo.

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