Kinshasa : kermesses en folie

Article : Kinshasa : kermesses en folie
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18 août 2014

Kinshasa : kermesses en folie

Kinshasa est un melting pot, qui, au-delà de ses difficultés liées aux conditions socio-économiques, incarne une culture festive qui se remarque notamment pendant les grandes vacances. Jadis, la capitale congolaise s’occupait sainement de vacances des enfants à travers diverses activités récréatives, entre autres colonies de vacances, kermesses , et surtout  la Foire internationale de Kinshasa (FIKIN) qui connut sa première édition en juillet 1969. Dans ses différentes éditions, on proposait une gamme variée de loisirs,  rencontres culturelles, littéraires, pédagogiques et artistiques. Victime de pillages de 1991 et 1994, la FIKIN a depuis lors cédé sa place aux kermesses dénuées de toute valeur culturelle ?

Une activité des enfants (Ph. Lokole)
Une activité des enfants (Ph. Lokole)

Membre de l’Union des foires internationales (UFI) depuis 1973, la FIKIN fut l’une de grandes foires d’Afrique centrale vers les années 90, et se voulait une vision  » ludo-éducative » pour un public vaste. Elle fut un lieu de prédilection pour tout vacancier avec une forte attraction ludique qui mettait en exergue les facteurs culturels, parce qu’ayant une influence sur les possibilités ds enfants de pouvoir jouer librement de diverses façons en se cultivant. Cette approche thématique a permis tant aux enfants qu’aux adultes de s’évader, s’amuser, se distraire, de s’épanouir en apprenant d’une façon naturelle, car jouer est une action universelle, spontanée, volontaire, et possède des valeurs thérapeutiques.

Participer à ce marché d’arts était un devoir en même temps qu’un défi. Certains écoliers voyaient leur participation conditionnée au résultat qu’ils obtiendraient à l’école. Cela les motivait et suscitait une sorte d’émulation. Tout participant devenait bénéficiaire de l’effet favorable de la participation à cette foire assortie de quelques cadeaux.

Ironie du sort, la  » pauvre «  FIKIN fut dévastée et pillée de fond en comble, et depuis lors, elle a beau tenter  de renaître de ses cendres et de redorer son blason longtemps terni par la prédation des inciviques. Une tache, qui jusque-là lui semble difficile au regard des priorités du gouvernement congolais et des investissements y afférents. Elle se remet timidement sur les rails, mais avec une édition foraine  et dénuée de tout contenu ludique au détriment de la valeur marchande.

Des sociétés brassicoles et autres en font leur affaire. Dans les stands ou bistrots, c’est la concurrence des marques de boissons. Primus, Skol, Nkoy, Turbo, Doppel, Mutzig et liqueurs fortes se rivalisent au sprint final sur un fond musical prêt à péter les tympans. Dans les Nganda ya Ntaba; espaces de grillades :  poulets braisés, cuisses rôtis, brochettes à la sauvette et viande de chèvre ou vache  absorbent toute la poussière de Kinshasa sans interpeller personne.

Grillage de la viande de chevre à Kinshasa
Grillage de la viande de chèvre à Kinshasa

L’occasion faisant le larron, dès le mois de juillet, Kinshasa vit dans une ébullition toute particulière de kermesses tous azimuts. Les opérateurs forains privés ont envahi le secteur avec ces  » Kermesses bidon «  vidées de toute valeur culturelle. Des enclos en triplex, nattes, bâches ou calques d’aluminium s’érigent autour de terrains de foot et quelques espaces libres, qui, d’ores et déjà, se transforment en des vastes chantiers d’ambiance et de dépravation des mœurs.

 Les résidents ne savent pas à quel saint se vouer et restent sans voix devant une telle propension de l’ immoralité. Une situation déplorable, mais  légitimée par les tenanciers des débits de boissons. L’inquiétude des parents est à son comble quant à l’éducation, la sécurité et l’encadrement de leurs enfants pendant les vacances.

Les parents huppés en profitent pour offrir des voyages touristiques à leur famille et renforcer les liens de paternité d’une part, et d’autre part conforter la culture générale et les valeurs traditionnelles chez les enfants. Des visites dans des sites, musées, bibliothèque, des cours d’encadrement afin de combler certaines lacunes ont un impact positif dans le processus d’apprentissage des adolescents.

Les enfants moins chanceux restent à la maison. L’amenuisement de pouvoir d’achat faisant la loi, les gamins consacrent leur temps à suivre les séries télévisées et ne développent pas leur capacité d’apprentissage. Un triste constat pour la RDC.

Colonie de vacances à Kinshasa (Ph. Lokole)
Colonie de vacances à Kinshasa (Ph. Lokole)

Le jeu en effet constitue donc un droit légitime de l’enfance. Les psychologues affirment que jouer est indispensable à la construction de l’enfant et son intégration dans la société. Il permet à l’enfant d’acquérir les apprentissages fondamentaux dont le savoir, le savoir-faire, le savoir-être  et le vouloir-faire. Les jeunes enfants allouent de 3 % à 20 % de leur temps et de leur énergie à jouer. 

Il faut reconnaître que le jeu doit faire partie intégrante de l’éducation des enfants. Il permet aux enfants de se construire, de développer leurs aptitudes avant d’apprendre à lire et à écrire. De plus, en jouant, les enfants expérimentent  l’apprentissage social et grâce au jeu, ils  peuvent exprimer leur stress et leurs  problèmes.

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